S.E.M le Président, trois petits mots mal compris !

Investiture de Michel Martelly à la présidence d'Haïti. Crédit photo : Google images

A>vant toute chose, il faut d’emblée poser cette question : pourquoi S.E.M ?

Ce sigle est l’abréviation de Son Excellence Monsieur, au féminin S.E.Mme: Son Excellence Madame, suivis du nom de la personne; un titre honorifique à l'usage des ambassadeurs résidents, gouverneurs généraux et chefs d'Etat et qui sont régis par les conventions diplomatiques.

Bien qu’honorifique le terme excellence revêt d’un sens propre. Il signifie: degré éminent de qualité, de valeur de quelqu’un, de quelque chose dans son genre. Il est d’usage que l’on appelle "excellence" celui qui s’est distingué de son ou ses concurrents, qui par conséquent devient l’excellent par rapport à eux. Ainsi donc, ce mot n’a de sens qu’en étant désigné l’excellent au milieu des moins bon et des nuls. Au fait, ce n’est pas toujours le cas. Mais à l’origine, c’est idéalement le sens du terme.

Il faut croire que le monde n’est pas toujours si cohérent qu’on le pense. Parfois, des moins bons ou des nuls se font appelé excellence au détriment des vrais excellents. 

Dans le contexte haïtien on assiste assez souvent à ce scénario. Prenons, la politique comme un genre au sens que l’on entendait dans la définition du terme excellence plus haut. Son histoire retient entre autres exemples le cas de tonton nò et récemment celui de sweet miky. Alors, est-il possible de démontrer que P. Nord Alexis était excellent par rapport à J. Anténor Firmin ? Quid de Michel J. Martelly par rapport à Mirlande H. Manigat ? Peut-on prouver qu’il est excellent par rapport à elle dans le genre politique ? Si oui en quoi ? Si vraiment par excellent on entend ceci : « qui est dans son genre à un degré éminent. »

Joseph Anténor Firmin est l’un des penseurs politiques les plus redoutables de son temps. Anthropologue, Avocat, journaliste, fonctionnaires de l’état (ministre, ambassadeur d’Haïti à l’étranger), auteur d’ouvrages scientifiques à succès. Intellectuels de renom, respecté et reconnu internationalement par ses conférences. Pierre Nord Alexis, son rival est aussi homme politique, général de l’armée. Ce nom ne dit presque rien au niveau de l’intelligentsia de l’époque, le savoir intellectuel n’était pas non plus son point fort. Il était seulement un citoyen haïtien jouissant de son droit civil et politique qui menait des luttes pour le pouvoir. Etant petit-fils d’Henri Christophe, il fut proclamer président et établit un pouvoir à vie qui a pris fin six ans après dans des conditions qui lui a couté l’exile.

Plus près de nous, Michel Joseph Martelly, un musicien très populaire grâce à son style grivois et son talent de dénigreur de son public. Il y a fait carrière. Il nouait des relations avec des personnages politiques dès sa jeunesse auxquels il est resté fidèle et ami pendant longtemps et semble partager pour le moins leur philosophie politique de putschiste. Admettons qu'en cela, il est bien excellent par rapport à Miralnde Hypolite Manigat professeure d’université, auteure de texte sur la constitution haïtienne, constituante de 1987, spécialiste en droit, diplômée de la Sorbonne, femme d’ancien chef d’Etat. Une tête plutot bien faite. Là encore, l’intelligentsia a pris un sacré coup. Michel passe pour l’excellent et Mirlande pour la moins bonne ou tout au plus, la nulle. Quelle ironie ! Ces deux exemples illustrent bien du non sens que peut être parfois le terme S.E.M.

Devrions-nous appeler excellence quelqu’un qui ne l’est pas en réalité ?

Quid du mot Président ?

Le titre de président est assimilable au chef d’état. Ce n’est pas tellement un titre mais une fonction. Cela dit, dès qu’on voit président on voit des responsabilités d’homme d’état comme veiller à la stabilité politique et sociale ; des devoirs entres autres, garantir la bonne marche des institutions, des exigences à savoir : protéger la souveraineté nationale. Bref, on voit un symbole national modélisé qui transparait à travers un homme ou une femme. C’est donc une icône représentant une institution digne d'être une nation. Il est fou de croire que chak rivyè ka desann ak sab pa yo.

La présidence est d’abord et avant tout une institution réglementée par un dispositif légal, il est vicié de vouloir nous faire croire que chaque individu investi comme président peut se donner le droit de le changer. Le président passe mais l’institution reste ainsi que la fonction présidentielle.

Encore investi dans ses "fonctions", se positionnant en satiriste, reprenant déjà son costume de Sweet Miky comme l’avait proposé dès son investiture un de ces mentors putschistes le prêtre catholique Louis N. Kébreau, fustigeant à tort et à travers quiconque identifié comme ennemi dans son délire schizophrénique, Martelly semble confondre la fonction du titre.

Le titre est vaniteux mais la fonction est sacrée. Il n’est pas donné à n’importe qui de se comporter en président. Il est plutôt facile de se faire appelé président. Vous l’aviez fait avant même d’être au palais. N’est-ce pas Martelly ? Et là, je m’en souviens de cette phrase du professeur Yves Dorestal : «il ne faut jamais confondre le mot et la chose ». Ce qui est sûr c’est qu’être président exige une certaine posture. Et l’on se doute que Monsieur Martelly soit capable de l’adopter tenant compte de sa nature. Chassez le naturel, il revient au galop disait l'adage. Il peut seulement se contenter de son titre, du mot, mais visiblement la fonction l’échappe totalement.

Le savoir être semble ne pas vouloir dire grand-chose pour Martelly. Et c’est compréhensible. N’est ce pas lui qui disait que les « plomes » ne servaient à rien et qu’à la vue des livres il a toujours de la migraine ?

Alors, pourquoi appelé président, encore moins S.E.M le président quelqu’un qui s’en fou pas mal de la fonction présidentielle mais qui s’accroche au titre vaniteux ? Il est de bon ton qu’on appel un chat par son nom. Dans ce cas, S.E.M le président est-ce une bonne appellation pour Martelly qui se croit plutôt sur un trône du temps jadis où tout dépend de ses caprices?